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Etre transgenre en Belgique : Un aperçu de la situation sociale et juridique

Dans sa Résolution du 12 septembre 1989 sur la discrimination dont sont victimes les transsexuels, le Parlement
européen appelle les Etats membres à développer une réglementation relative à l’accueil, à l’accompagnement
et au traitement des personnes transsexuelles, afin d’enrayer les discriminations et les inégalités dont
celles-ci sont victimes.

Cette Résolution a été soutenue par la Recommandation 1117 du Conseil de l’Europe du 29 septembre 1989. Il
y est stipulé que par manque d’une législation spécifique, les personnes transsexuelles sont souvent victimes
de discrimination et de violation de leur vie privée. C’est pourquoi le Conseil des Ministres du Conseil de l’Europe
est invité à adresser une recommandation aux Etats membres, afin qu’ils introduisent une réglementation
qui permettrait, en cas de transsexualité irréversible, de rectifier la mention concernant le sexe d’une personne
sur l’acte de naissance et les pièces d’identité, de changer de prénom, de protéger la vie privée des personnes
et d’interdire toute discrimination liée aux libertés et droits fondamentaux.

Dans le contexte belge, quelques lois ont récemment été promulguées afin de répondre à cette Résolution et
à cette Recommandation, qui datent déjà d’il y a vingt ans. Citons la loi du 10 mai 2007 sur la transsexualité
(MB du 11 juillet 2007), qui définit le droit de changement de prénom et de sexe sur l’acte de naissance, loi par
laquelle le changement officiel de sexe devient une question administrative. La loi du 10 mai 2007 tendant à
lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes (MB du 30 mai 2007 ) détermine que pour l’application
de cette loi, une distinction directe fondée sur un changement de sexe est assimilée à une distinction
directe fondée sur le sexe (article 4 §2). Ceci signifie que dans le cadre de sa mission juridique, l’Institut pour
l’égalité des femmes et des hommes (IEFH) est compétent pour intervenir en matière de discrimination fondée
sur le sexe des personnes transsexuelles.

Dans son document thématique sur les droits de l’homme et l’identité de genre, qui a été publié en juillet
2009, Thomas Hammarberg, commissaire aux Droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, incrimine la transphobie
et la discrimination toujours incessantes des personnes transgenres. Il indique notamment que de très
nombreuses législations nationales ne font référence qu’aux personnes transsexuelles, à savoir les personnes
qui souhaitent subir, subissent ou ont subi une gender reassignment surgery (GRS, opération de conversion
sexuelle, voir plus loin), ce qui exclut une grande partie de la communauté transgenre. Il qualifie de précaire
l’accès aux soins de santé et au marché du travail pour les personnes transgenres, ce qui semble également
être le cas en Belgique.

Les plaintes que reçoit l’IEFH montrent que l’inégalité de traitement et la discrimination des personnes travesties,
transgenres et transsexuelles sont également choses courantes en Belgique, et que la politique actuelle
et la législation existante n’offrent donc qu’une garantie relative en ce qui concerne la protection des droits
de ce groupe très diversifié.

C’est la raison pour laquelle l’IEFH a fait réaliser une étude sur la situation sociale et juridique des personnes
transgenres en Belgique. L’objectif de cette étude est de dresser un aperçu des discriminations et des inégalités
observées dans la pratique, dans la politique et dans la législation, afin de pouvoir ainsi traiter les plaintes de
façon correcte et efficace, développer une politique effective pour les personnes transgenres et transexuelles
et formuler des recommandations efficaces destinées aux autorités, aux particuliers et aux institutions.

Cette mission de recherche a été attribuée au Steunpunt Gelijkekansenbeleid (Consortium Universiteit Antwerpen
- Universiteit Hasselt), en collaboration avec l’asbl Cap-Sciences Humaines de l’UCL. L’étude, qui s’est
déroulée de mars 2008 à juin 2009, a été effectuée par Joz Motmans (responsable de projet), Inès de Biolley
et Sandrine Debunne, sous l’accompagnement du Prof. Dr. Josse van Steenberghe et d’Ada Garcia. Le présent
rapport forme le résultat de l’excellent travail qu’ils ont fourni. L’IEFH les remercie pour la bonne collaboration
mise en place dans le cadre de ce projet.

Mes remerciements s’adressent également à la Direction générale Registre national – Relations externes du
Service public fédéral Intérieur, Direction générale Institutions et Population, qui a mis à la disposition de
l’IEFH des données d’enregistrement anonymes relatives au nombre de changements de sexe, ce qui nous a
permis de présenter, dans le présent rapport, une estimation relativement précise de la taille (d’une partie)
de ce groupe-cible.

Je tiens finalement à remercier les membres du comité d’accompagnement externe pour l’intérêt dont ils ont
fait preuve dans cette recherche : Yves Dario (Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme), Dr.
Griet De Cuypere (UZ Gent), Eva Dumon (Çavaria), Erica (T-werkgroep), Prof. dr. Jean Jacqmain (Conseil de l’Egalité
des Chances entre Hommes et Femmes / Université Libre de Bruxelles), Max Nisol (asbl Genres Pluriels),
Prof. dr. Femke Olyslager I.M. (Universiteit Gent), Dr. David Paternotte (Université Libre de Bruxelles), Tanguy
Pinxteren (asbl Genres Pluriels) et Tim Wuyts (K.U.Leuven / CD&V-Kamerfractie). Leurs points de vue, commentaires
et ajouts captivants et éclairés ont sans aucun doute fortement contribué à la réussite de cette étude.

Michel Pasteel,
Directeur de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes
Septembre 2009

Télécharger l'étude